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Les femmes autistes à l'ONU

 

Par Weirda

Chaque jour a son lot de richesses mais certains jours ressemblent relativement aux autres.

D'autres, à l'inverse sont spéciaux.

 

Aujourd'hui, j'ai passé une journée particulière, parce qu'aujourd'hui, j'ai été invitée à l'ONU pour parler des femmes autistes.

 

En ce moment, aux quatre coins du monde, dans le cadre du 20e anniversaire de la conférence de Beijing, ont lieu des événements visant à promouvoir « un monde où chaque femme et chaque fille peut exercer ses libertés et ses choix et connaître et comprendre tous ses droits, notamment le droit de vivre sans violence, le droit à l’éducation, le droit de participer à la prise de décision et le droit de recevoir un salaire égal pour un travail égal. »

Pour en savoir plus, c'est sur ce lien

 

Dans ce cadre, les organisations Autistic Minority International, the International Alliance of Women, Inclusion International, the International Disability Alliance and the NGO Forum for Health se sont mobilisées et rassemblées pour organiser un événement sur les femmes autistes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Eric Lucas, responsable de l'Alliance Autiste et Erich Kofmel, de Autistic Minority International, organisateur de cet événement, m'ont proposé d'y participer et je les remercie beaucoup pour cela.

 

A vrai dire, je n'étais pas très partante au départ. Je trouvais cet événement vraiment super mais de mon côté, je peux avoir du mal à parler de moi, encore plus en public. De plus, il devait certainement y avoir une part de manque d'estime de moi, me disant que d'autres auraient certainement des choses plus intéressantes à raconter que moi ou encore que je ne parlais pas assez bien l'anglais pour participer à cela. Enfin, cet événement ayant lieu à Genève, je ne me sentais pas vraiment de conduire jusque là-bas, d'autant plus ne connaissant pas l'itinéraire à l'avance. Ainsi, j'ai au départ relayé le message, espérant pouvoir trouver quelqu'un qui participe. En parallèle, j'ai parlé de cela à ma mère (à qui je me confie beaucoup) et elle m'a encouragé à y participer moi-même. Je lui ai demandé si elle m'y accompagnerait et elle m'a répondu que cela lui ferait plaisir. Par conséquent j'ai accepté, et je ne le regrette vraiment pas !

 

D'une part, ce fut l'occasion de belles rencontres et d'un moment très riche.

 

J'ai de mon côté été invitée pour faire un petit discours sur mon parcours, mes difficultés en tant que femme autiste. Vous pourrez trouver mon discours en version originale (anglaise) et traduit en français en cliquant sur les leins suivants:

  

                  Une femme asperger                                                 A woman on the autism spectrum

 

 

Cependant, en tout, nous étions cinq femmes à parler :

 

- Lyda Verstegen, la présidente de séance et présidente de l'Alliance Internationale des Femmes, une personne charmante, qui, je le crois, a appris des choses sur l'autisme en ce jour. Elle m'a fait très plaisir en me remerciant à plusieurs reprises et en me disant à quel point mon discours l'avait touché.

 

- Chiara Servili, de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a parlé des différences de genre dans les TSA, pouvant rendre les filles plus discrètes et conduisant au fait que ces dernières soient sous-diagnostiquées. Elle même a également appris des choses pour cet événement et lors de cet événement.

 

Les trois autres femmes que nous étions avons toutes un diagnostci d'autisme :

 

- Dena Gassner, venant des Etats-Unis, de l'Université d'Alephi, est une travailleuse sociale spécialisée dans le coaching de la famille et des personnes autistes. Elle a parlé à la fois de la problématique des femmes autistes et à la fois de son parcours. Elle est de plus la maman d'un garçon autiste.

 

- Olley Ewards, venant d'Angleterre, actrice, modèle, auteur (du livre ci-contre), réalisatrice et mère de trois filles dont deux autistes, a parlé de son parcours de femme autiste.

 

Il était vraiment intéressant de voir comme nos discours ont pu se faire écho sur certains points, alors que nous avions préparé cela de manière totalement indépendante.

 

Ce fut un plaisir de rencontrer ces personnes, mais également Monique Blakemore, autiste également, accompagnant Olley (et filmant l’événement), qui est la co-fondatrice de Autism Women Matter (UK), tout comme Tchaurea Fleury, de l'International Disability Alliance.

 

L'assemblée n'était pas nombreuse (une vingtaine de personne- il faut dire que la conférence commençait à 8h30 et qu'il y avait de plus d'autres conférences en simultané ! ), mais elle a semblé très intéressée par nos propos. Il y a eu plusieurs questions et presque tous sont venus nous voir et nous remercier en fin de séance, voire nous poser d'autres questions. Je dois avouer que je n'ai pas toujours tout compris de toutes les questions publiques, mais il y avait dans l'assemblée un médecin de l'OMS qui se demandait comment il se faisait que toutes ces problématiques sur les femmes autistes n'aient pas été soulevées plus tôt. A la fin, il est venu me demander comment les choses se passaient en France... Je lui ai brièvement expliqué qu'en France, les choses était très particulières en matière d'autisme car l'empreinte de la psychanalyse est encore très importante.

A l'issue de la conférence, nous nous sommes toutes retrouvées, ainsi que Erich Kofmel, pour un café et nous avons eu l'occasion de rediscuter un peu de cela. Je crois qu'elles ont été plutôt surprises de voir le retard que pouvait avoir la France comparativement à l'Angleterre ou aux Etats-Unis: culpabilisation des mères, packing encore employé...

 

Bref, ce fut vraiment un très beau moment avec des personnes que je ne connaissais pas et que j'ai beaucoup apprécié!

 

 

D'autre part, ce fut aussi l'occasion d'un beau moment avec ma maman.

Sur le trajet du retour, nous avons bien discuté.

 

Extrait 1 (condensé!):

Maman :- « Pour moi tu ne me semblais pas si différente lorsque tu étais enfant.

Moi : - Oui, c'est normal, les filles sont souvent beaucoup plus discrètes. J'avais des difficultés de socialisation mais je n'en parlais pas et j'avais tout de même quelques copines. J'étais 'obsédée' par les animaux, mais cela ne choquait pas. Par contre, j'avais d'autres petits signes, comme mes problèmes de sommeil, le fait de me réveiller chaque nuit...

- Ah oui, ça c'était vraiment pénible...!

- Et puis mes difficultés avec l'alimentation...

- Ah oui, mais ça ça ne me semblait pas bizarre car moi j'avais eu les mêmes problèmes. Dès qu'on voulait me faire manger de la viande, cela me faisait vomir. D'ailleurs, le gens ne veulent pas croire que l'on peut avoir  des haut le cœur, des vomissements en mettant certains aliments en bouche, mais c'est vrai... On me laissait devant mon assiette... Ca a été difficile pour moi... Ca a du être difficile pour toi aussi... »

 

Extrait 2 (condensé):

Maman : - « Tu m'autorises à mettre des photos sur facebook ?

Moi : - Euh... Je ne sais pas... Pourquoi ? Tout le monde va le voir !

- Parce que je suis fière de toi (nb : ce n'est pas une parole fréquente de la part de ma maman car on est plutôt réservés dans la famille). Et ce n'est pas grave si les autres le vois, au contraire, ça me permettra de leur expliquer. Je pense que c'est important que les gens sachent car ça permet de comprendre des choses. Parfois certains ne comprennent pas certaines choses de toi. Ton grand oncle par exemple, ne comprends pas que parfois tu m'appelles pour certaines choses techniques de la vie quotidienne ; il se dit que tu pourrais te débrouiller ; il peut porter un jugement et je pense que c'est important de lui expliquer. » (nb : ce même oncle m’avait dit, il y a quelques temps : « je suis content de voir ce que tu es devenue car lorsque tu étais petite, tout le monde se demandait vraiment ce qu'on allait faire de toi » Glurps... J'avais été surprise et avait demandé qui était le « tout le monde » et la rasion de cette interrogation. Il n'avait pas voulu me donner beaucoup de détails mais m'avait répondu « tes oncles, tes tantes... Tu étais invivable, et tellement capricieuse... »)

 

Bref, je vous passe la suite, mais nous avons ainsi parlé du fait que nommer les choses aide à comprendre. Comme je l'ai dit, mon diagnostic a été très important pour me comprendre et me déculpabiliser d'être comme je suis. Pour autant, je n'en ai pas beaucoup parlé autour de moi, excepté à ma famille proche et aux personnes dans le monde de l'autisme et ceci pour trois raisons. La première c'est que les gens ne connaissent pas l'autisme et en ont une vision très réduite et stéréotypée. Je n'ai pas envie d'entendre "pff, n'importe quoi" (mon diagnostic a été établit d'abord par une neuropsychologue spécialisée, puis par un psychiatre spécialisé et enfin par l'équipe d'un CRA - voir cet article- et au risque de décevoir ceux qui croient tout savoir, je pense qu'ils connaissent mieux l'autisme qu'eux!). La deuxième, découlant de la première, c'est que je ne veux pas que les gens pense que je prends l'autisme comme 'excuse'. La troisième, c'est que je pense qu'il reste difficile pour moi d'avouer certaines choses : si j'ai passé ma vie à essayer de cacher certaines difficultés c'est parce que je voulais être comme tout le monde et que j'avais une certaine honte à ne pas l'être (par exemple, encore actuellement, je peux me sentir un peu honteuse de ne pas être totalement autonome).

Aujourd'hui, je pense que ma mère a raison : c'est bien d'en parler car cela permet d'expliquer les choses aux autres. Je n'ai pas de honte à être qui je suis car je suis quelqu'un de bien, malgré certaines différences.

 

Mon « coming-out » en tant que personne autiste a débuté. Il ne faut pas que ça aille trop vite ; et si cela ne me dérange pas trop que ça se sache dans ma vie privée, je ne suis pas encore très prête à ce que cela déborde sur le professionnel (quoi que parfois j'aurais bien envie de parler de certaines choses!)

 

Ce soir, ma mère a publié quelques photos sur facebook, accompagnées du message suivant :

« Bravo Adeline, une grande admiration pour ta ténacité et ton combat dans ton "début" de vie. Tous les intervenants m'ont dit que je devais être fière de ma fille , je le suis bien évidemment. Même si mon anglais laisse à désirer, j'ai compris les compliments!!! Rencontre bien sympathique avec les intervenants et la modératrice , café devant le Mont Blanc et le Léman. Maintenant, je vais profiter des cours de Savoie Biblio et l'anglais je m'y remets! »

Mes frères ont également commenté qu'ils étaient fiers de moi.

 

Je dois avouer avoir été beaucoup touchée...

 

Pour conclure, un très grand merci à tous les acteurs de cette journée et à ceux qui m'ont permis de participer à celle-ci.

Je repars avec de très bons souvenirs, des émotions positives et un livre à lire (merci Olley ;) )!

 

 

Nb: ceux qui voudraient des photos de l'évenement, ou la vidéo, me contacter via la page facebook.

 

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